Il m'est arrivé un truc... terrifiant. Si, si, pour moi c'est terrifiant : entre un "hygiénisme" angoissant, et une "anomisation" galopante de tous nos rapports sociaux.
Je m'explique. Sortant d'un rendez-vous, j'ai une petite faim, j'entre dans une boulangerie, a priori une simple boulangerie. Je me choisis une petite douceur, on m'en annonce le prix, je tend un billet.
"Non, ici" m'ordonne la vendeuse en me désignant une fente dans une espèce de bulle en plastique. J'ai bien mis trois secondes à comprendre. Mais c'est bien ce qu'elle voulait : que j'enfile mon billet dans la fente de la bulle. Ca a été plus fort que moi, j'ai dit "non".
"Si, si, qu'elle me répond. On ne peut pas faire autrement, c'est comme ça."
Donc soit je renonçais à la douceur en question, soit je cédais à la machine et lui laissait abolir le geste humain, simple et millénnaire de l'échange de monnaie. J'ai cédé.
J'ai glissé mon billet dans la fente, cela à fait un petit bruit, suivi de cliquetis, puis d'un bruit inqualifiable de pièces roulant dans un creux en plastique transparent. Pas même le bruit désormais familier des distributeurs de café ou de coca qu'on trouve sur les péages d'autoroute. Non. Un bruit terriblement vulgaire.
M'en offuscant plus tard devant des copains, ils ont haussé les épaules d'un air entendu. "Ben oui, c'est pour mieux contrôler ce qui passe dans les caisses..."
Ah d'accord... A force de considérer les gens qui travaillent comme de simples coûts non compétitifs... on passe à autre chose de plus... Quoi ? Soupçonneux ?
Dans ces conditions, c'est sûr, la machine qui dispense de toute considération humaine est plus confortable. On ne peut rien lui repprocher.
Mais moi, si. Ces machines j'en veux pas.
Donc boycott définitif de la dite boulangerie.
Je sais c'est une goutte d'eau dans un océan de machinalité. Mais de nombreux autres auront peut-être envie de faire comme moi ?
Merci d'avance.
Je milite pour que les êtres humaines continuent à se rendre la monnaie !
Je milite pour que l'argent continue de circuler de la main à la main.
Je milite pour que les machines ne s'approprient pas aussi nos échanges.